Peu de concerts, jamais de promo, très peu de disques, le topo sur Shellac, on le connaît. Alors forcément quand un nouvel album voit le jour, on a tendance à s’intéresser un peu. Et pourtant, on ne peut pas dire que celui là soit la pièce tant attendue, puisqu’une bonne partie des titres a déjà été jouée ces dernières années, certains étant disponibles sur d’autres supports. Qu’importe. Shellac semble s’en foutre complètement. Et cet album remet les choses au clair, à l’image des concerts où le groupe se fait un grand plaisir à jouer avec une énergie crue, une urgence punk qui manque à beaucoup. Et cela quitte à jouer de façon aléatoire, à s’en foutre, à blaguer pour démonter l’austérité qui semble être à la mode dans le genre, à montrer à tous ceux qui s’en réclament que l’art des mathématiques dans le rock est sans doute une chose très ennuyeuse si l‘on ne sait pas y adjoindre la grande énergie du n‘importe quoi. Alors oui, Shellac va peut-être en rebuter certains ici, tant le groupe enfonce le clou de l’austérité, s’autorisant parfois un débordement lyrique, sur be prepared notamment ou sur le très énergique spoke. Dans l’ensemble, Shellac se joue des constructions en faisant la surenchère de l’abrasif, de la tension jusqu‘au bout du doigts de pied, d’une approche qui est plus sonore que « musicale ». Des phrases déclamées, des constructions improbables et une sérieuse tendance à mettre en avant, plus qu’avant encore, la rythmique aux dépends d’une tentative mélodique. Les passages aux instruments uniques se multiplient. Une voix lointaine mise en avant, un fond de batterie qui crève doucement dans un coin, une abrasion de guitare de temps à autre, voilà pour l’ensemble. Mais, malgré la difficulté, Excellent Italian Greyhound est remarquable, remarquable d’une certaine beauté de fin du monde, de poésie industrielle. Sans doute l’album le moins accessible de Shellac, qui semble vouloir gueuler à la face du monde, que finalement, de reconnaissance ils n’en veulent pas, et qu’on a plutôt qu’à aller se faire foutre si l’on attendait quelconque messie ou génie visionnaire qui aurait pu fournir prétexte à une nouvelle masturbation de cerveau. Putain j’adore ce groupe.
Touch & Go Records